SARS-COV-2, un traumatisme psychique bien réel.

Opinion : SARS-COV-2, un traumatisme psychique bien réel.
Publication co-écrite par Jean-Pierre Alibeu et Maud Guériaux GUERIAUX
La période actuelle est génératrice d’anxiété et de peurs : ce virus SARS-COV-2 qui paraissait en début d’année très lointain était observé comme un pathogène exotique, provoquant une maladie qui ne viendrait jamais nous rencontrer, une sorte d’Ebola, ou de lèpre, cela ne nous concernait pas.
Mais petite à petit, en fait très vite, ce virus s’est répandu le long des axes intenses de la mondialisation ; « de la route de la soie » notre civilisation est passée à un réseau universel où chacun est acteur, dont chacun est partie prenante. La voie était ouverte à cette pandémie fulgurante qui semble n’épargner personne, même dans les contrées reculées, même dans les petits villages de nos campagnes, au cœur de nos cités. La « peste », comme au moyen âge, envahit tout. Il n’y a pas d’arme, pas de bouclier semble-t-il. L’ennemi, c’est l’autre, et il est partout, invisible. Alors survient pour chacun le traumatisme psychologique dont tous les éléments sont présents : un évènement imprévisible, vide de sens, générateur d’effroi et d’impuissance, que l’on ne peut ni fuir ni combattre. Tout y est, alors que faire devant ce tsunami de peur et d’anxiété, ce figement que cela génère ?
Comment l’organisme peut-il réagir à cette situation de dis-stress ? Si ses capacités d’adaptation sont dépassées, des comportements défaillants vont apparaitre : anxiété, dépression, angoisse, phobies, hyperactivité, douleurs, myalgies, fatigue, troubles disautonomiques : hyperthermie, troubles cardiaques, déficit de l’immunité, stress socio-professionnel. Et au-delà attaque de panique, agressivité, intéroception, catastrophisme, hypervigilance.
La médiation neurobiologique du stress dépend essentiellement du système GABA-glutamate au travers d’un phénomène de balance entre processus inhibiteur et activateur ; cette balance a schématiquement pour rôle d’harmoniser d’une part les échanges d’informations dans les réseaux cortico-limbiques et de permettre d’autre part le déclenchement d’une cascade de réponses protectrices. Cette balance est perturbée lors d’une aggression sévère, traumatique, infectieuse, virale, entrainant une comorbidité et de multiples symptômes : dépression, agoraphobie, troubles alimentaires, addictions, tremblements, palpitations, dyspnée, que l’on retrouve souvent associées dans la clinique du COVID-19.
L’hypnose a devant ce tableau traumatique intense toute sa place pour amener l’organisme à réguler cet emballement, à remettre l’organisme à l’équilibre, à sortir l’individu de son figement. Il s’agit de sortir le sujet de sa transe négative (angoisses, projections, croyance, catastrophisme) en remobilisant sa capacité à penser, en repérant les éléments du vécu qui ont fait trauma, et en les traitant en hypnose. L’idée n’est pas de retirer l’angoisse par une simple relaxation ; comme le rappelle Bessel van der Kolk (1) « les traumatisés vivent avec des sensations qui semblent intolérables : impressions de cœur brisé, gêne respiratoire ou terribles nausées. Pourtant chercher à éviter de les éprouver augmente le risque qu’elles surviennent ». L’objectif en hypnose est de transformer ce qui génère l’angoisse en traitant le traumatisme : convoquer les affects traumatiques afin de permettre aux réseaux cérébraux de relancer le mécanisme de mémorisation.
Gardons à l’esprit que la pandémie à SARS-COV-2, au-delà d’une morbidité et d’une mortalité conséquentes qui font vaciller les institutions hospitalières, aura des effets potentiellement très délétères sur une part importante de la population atteinte ou non par le virus. Il est urgent de traiter cet aspect de la crise, pour remettre au plus vite un bon lien familial, social et professionnel, dans le respect des précautions en usage dans le cadre du confinement.
- Bessel van der Kolk. Le corps n’oublie rien. Albin Michel 2018, pp590
Journée Francophone de l’Hypnose – Lyon

Compte-rendu de Congrès
La troisième journée francophone de l’hypnose s’est tenue le 7 février 2020 à Lyon, à l’espace tête d’or, en présence de 250 professionnels de santé venus de toute la France, sur le thème de la comorbidité du trauma.
Les traumatismes psychologiques sont un lot commun de l’humanité, débutant pour tout un chacun à la naissance, plus ou moins intensément. Les répercussions neurophysiologiques sont immédiates, certaines bénéfiques comme la mise en activité des systèmes inhibiteurs de la douleur. D’autres vont laisser des traces, des agrégats comme le dit Damasio, infiltrant les réseaux du monde intérieur, l’inconscient au sens le plus large, se déposant comme les pièces d’un puzzle souvent difficile à reconstituer. L’impact du PTSD a été démontré dans diverses pathologies telles que la dépression, l’anxiété, la fibromyalgie, les désordres cardiovasculaires, des troubles immunitaires.
L’hypnose est un outil tout à fait adapté à nettoyer ces agrégats et à remettre en mouvement toutes ces fonctions qui sont restées dans un figement post traumatique. C’est ce que se sont attachés à démontrer les conférenciers pressentis pour leur expertise, chacun dans son domaine de compétence.
La petite enfance, la fin de vie, la maïeutique, la douleur chronique, la radiologie, les urgences et bien d’autres domaines ont fait l’objet d’une conférence ou d’un atelier faisant le point sur l’état de l’art.
On comprend que le thérapeute doit s’attacher à retrouver toutes les traces sensorielles et émotionnelles en lien avec le traumatisme sans y être arrimées, et reconstituer le récit de la séquence traumatique afin que le sujet puisse enfin l’inscrire, la symboliser. En hypnose il pourra ensuite permettre au sujet d’intégrer l’ensemble de la séquence.
Cette journée a exploré ces différentes situations en mettant en exergue la place et l’intérêt de l’hypnose intégrée dans le chemin clinique et thérapeutique. Dans ce chemin, chacun y a sa place, y apportant sa sensibilité et son expertise.
Une table ronde a permis à chacun de s’exprimer, suscitant de nombreux échanges.
L’an prochain, nous installerons cette nouvelle version de la Journée Francophone de l’Hypnose à Paris, avec comme thème central la maladie chronique.
Dr Jean-Pierre Alibeu
Retrouvez sur infirmiers.com, l’article suivant : « Le traumatisme était au cœur de la 3ème Journée Francophone de l’Hypnose » co écrit par le Dr Jean-Pierre ALIBEU et Maud Guériaux, hypnothérapeute.